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Le Nouvel Hollywood :
les cinéastes prennent le pouvoir !
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Les années 60, crises et doutes du cinéma hollywoodien
Au milieu des années 60, les grands studios hollywoodiens sont à l’agonie… Pour concurrencer la télévision naissante et faire revenir le public dans les salles, ils se sont lancés dans la réalisation de super productions coûteuses qui les ont menés, pour certains, au bord de la faillite. La Fox semble ainsi ne pas pouvoir se remettre du gouffre financier induit par la production de Cléopâtre. Ces films-fleuves au propos historique semblent de toute façon avoir lassé le public…
Le cinéma est depuis toujours l’affaire des studios et des producteurs qui les dirigent : ce sont eux qui financent, donc eux qui décident de ce qui sera tourné ou pas. De plus, le code Hays, entré en vigueur en 1934, a aseptisé les propos en les vidant de toute velléité de révolte ou de déviance. Les personnages des films doivent être des héros positifs à la morale exemplaire, ou alors leur histoire doit s’inscrire dans le passé afin que personne n’ait envie de prendre exemple sur eux dans le présent. Et les méchants sont forcément punis à la fin ! Dans ce contexte, les grands réalisateurs, pourtant reconnus encore aujourd’hui pour leurs audaces formelles, ne se déclarent eux-mêmes que comme salariés d’un système entièrement dévoué au grand spectacle et à l’éducation bienveillante des foules. Mais bientôt, de jeunes réalisateurs ambitieux vont leur démontrer qu’ils ont tort…
Prémices d’un nouveau cinéma
La révolution ne s’est pas faite du jour au lendemain. Il a fallu d’abord que naissent de nouvelles façons de consommer du cinéma. Les drive-in, par exemple, se multiplient à la fin des années 50 et rencontrent le succès auprès d’un public plus jeune, au goût différent de ses aînés. Ils sont avides de films d’action et d’amour que les grands studios vont mépriser, leur donnant le nom de « séries B ». Mais d’autres s’en font une spécialité. C’est le cas de Roger Corman, dont le studio florissant grâce au film de genre attire de tout jeunes cinéastes et acteurs, intéressés par le fait de faire des films, à tout prix. Francis Ford Coppola (qui réalise grâce à Corman son premier film, Dementia 13), Peter Bogdanovich, Martin Scorcese, Peter Fonda, Jack Nicholson, Charles Bronson, Robert Towne, Menahem Golan, Dennis Hopper, Bruce Dern, Diane Ladd… ont tous démarré grâce à Corman.
Steven Spielberg, Martin Scorsese, Brian De Palma, George Lucas et Francis Ford Coppola
(source: http://briandepalma.over-blog.com/article-35505123.html)
Mais avant que cette génération n’explose, des réalisateurs plus âgés, qui rongeaient leur frein dans l’ombre des studios, s’enflamment pour le cinéma européen qu’ils découvrent dans les salles d’art et d’essai. Truffaut, Godard, Fellini, Antonioni… Tous sont devenus des références pour ces cinéastes. A New York, deux jeunes journalistes, Robert Benton et David Newman, décident de se lancer dans l’écriture d’un scénario. Le projet s’appelle Bonnie & Clyde… Ils profitent de leurs relations pour transmettre le scénario à François Truffaut qui leur prodigue de précieux conseils. Restait à trouver producteur et réalisateur… C’est alors qu’Arthur Penn, revenu d’un voyage en France avec l’envie de réaliser un film selon le mode narratif de la Nouvelle Vague, sort Mickey One, avec l’acteur Warren Beatty. L’expérience plaît à ce dernier, ambitieux jeune premier qui ne supporte pas les rôles convenus du vieil Hollywood. Il tombe peu après sur le scénario de Bonnie & Clyde et convainc Penn de le réaliser. Il convainc également Jack Warner de le produire… Il n’aimera pas du tout le film ! Mais heureusement ce ne fut pas le cas du public et des critiques. En brisant certains tabous, notamment par sa grande violence, le film ouvrait la voie, enfin, à un nouveau cinéma. Grâce aussi, au même moment, à l’abandon définitif du code Hays (1968), tout devenait possible !
Liberté, drogue, sexe, violence… le Nouvel Hollywood s’affirme
Mais les producteurs restent frileux… Il faudra le courage de quelques-uns, tel Bert Schneider à la Colombia, pour que de nouveaux films voient le jour. Il produit ainsi le film culte de la génération hippie : Easy rider (1969), réalisé par Denis Hopper avec Peter Fonda et Jack Nicholson. Il y eut aussi United Artists qui se vantait d’être la seule société de production à laisser de la liberté aux artistes. Ils aidèrent ainsi John Schlesinger à sortir Macadam Cowboy en 1969, qui fut d’abord classé X avant d’être finalement juste interdit aux moins de 17 ans après avoir reçu l’Oscar du meilleur film en 1970. Ces deux films sont le reflet d’une jeunesse partagée entre révolte et résignation face à un avenir incertain. Guerre du Viêtnam, révoltes raciales, assassinats violents… Une page se tourne dans l’histoire des Etats-Unis et dans celle de son cinéma…
De grands cinéastes peuvent enfin se faire connaître : Woody Allen avec Prends l’oseille et tire-toi (1969), Robert Altman avec M.A.S.H. (1970), puis Sam Peckinpah qui pousse la violence vers un certain lyrisme et modifie considérablement la façon de faire des films (La horde sauvage – 1969).
Mais celui qui se fit le plus remarquer fut Francis Ford Coppola. Après avoir démarré sa carrière chez Roger Corman, presque sans salaire, il est le premier à fonder une société de production indépendante, American Zoetrope, pour pouvoir y faire les films qu’il aime. Il fera Les gens de la pluie en 1969, puis produira THX 1138 de son ami Georges Lucas en 1971, film incompris, boudé par le public à sa sortie mais devenu culte ensuite. Enfin, Coppola adapte en 1972 le roman à succès de Mario Puzo sur la mafia italo-américaine… Avec Le Parrain puis sa suite Le Parrain 2 (1974), avec sa grandiose épopée sur le Viêtnam Apocalypse Now (Palme d’or à Cannes en 1979), Coppola s’impose comme l'un des réalisateurs les plus influents et les plus puissants des années 1970. Ces années 70 donnent ainsi au cinéma hollywoodien ses films les plus marquants, dérangeants, violents… Des chefs d’œuvres devenus cultes et classiques, que l’on ne peut tous citer ici (voir notre sélection en bas de page).
Spielberg, Lucas et la fin du Nouvel Hollywood
Mais le public se lasse, à nouveau. Les studios aussi se lassent des egos démesurés de certains cinéastes et de leurs excès de drogue et d’alcool. Ils produisent des histoires plus accessibles, venues d’une autre génération de cinéastes, plus dociles. Des films comme L'Arnaque (Georges Roy Hill - 1973), Vol au-dessus d'un nid de coucou (Milos Forman - 1975), ou Les Hommes du président (Alan J. Pakula - 1976) allient dénonciation sociale avec une histoire et une mise en scène plus adaptées aux normes commerciales.
Et les réalisateurs finissent par comprendre eux-mêmes ce que sera l’avenir d’Hollywood. En 1975, Steven Spielberg réalise Les Dents de la mer, énorme succès, rétrospectivement considéré comme le premier des blockbusters américains. En 1977, il fut détrôné par Star Wars… Avec ces films, Lucas comme Spielberg allaient poser les bases d’un nouveau cinéma populaire, avec une trame proche des contes de fée, positive et manichéenne et surtout rempli d’effets spéciaux. Avec la fin de la guerre du Viêtnam, le public veut voir à nouveau des films légers, tournés vers l'évasion et l'imaginaire. Les américains élisent un acteur de cinéma, Ronald Reagan, à la tête de leur pays, et Hollywood devient l’empire du divertissement…
Aujourd’hui cependant, il est navrant de constater que les dérives sociales dénoncées par le Nouvel Hollywood sont toujours d’actualité : racisme, extrême pauvreté due à un capitalisme arrogant, conflits armés qui génèrent des traumatismes chez ceux qui en sont victimes… En revoyant ces films, on se rend compte que leur force est toujours intacte.
Les réalisateurs et les films du Nouvel Hollywood
Pour s’informer sur le Nouvel Hollywood
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Événements autour du Nouvel Hollywood
Profitons du cycle que lui consacre la Cinémathèque à partir de ce mois de janvier (programme complet disponible sur : http://cinematheque.tours.fr/).
Trois séances sont proposées à la médiathèque François Mitterrand, avec trois premières œuvres de cinéastes emblématiques de cette époque :
- Vendredi 24/01 : La balade sauvage de Terrence Malick
- Vendredi 14/02 : Blue Collar de Paul Schrader
- Vendredi 13/03 : Duel de Steven Spielberg