Mémoire de l'oubli

« L'œuvre Our Prayer de Donald Ayler, a été qualifiée de l'une des plus grandes compositions des années 60, et je m'en souviens très bien car elle sonnait solennellement dans l'église luthérienne Saint-Pierre du centre de New York, le 21 juillet 1967, aux funérailles de John Coltrane. Our Prayer, telle qu'elle a été présentée ce jour-là, n'aurait pas pu être plus appropriée à l'époque, que maintenant… En juin 1965, j'avais lu quelque part qu'un saxophoniste ténor bouleversait le monde du jazz. Je suis immédiatement allé à New York. Je suis entré chez un disquaire de la 8ème avenue et j'ai découvert un album sans image très curieux, enregistré uniquement sur une face, avec un logo sérigraphié sur l'autre. Alors que je me tenais debout avec la mine étonnée, une voix au-dessus de mon épaule droite m'a demandé : “Que pensez-vous de cela ?” J'ai répondu : “Je ne sais pas, mais que j'ai hâte d'entendre cette musique.” L'homme s'est présenté en disant : “C'est mon frère, c'est notre nouvel enregistrement, je suis Don Ayler et je suis trompettiste.” Le son de cette musique m'a lancé dans un voyage qui se poursuit encore jusqu'à ce jour… Avec cet album hommage extraordinaire à un musicien trop longtemps éclipsé et tristement oublié par une communauté qui doit tant à son influence, nous aurons désormais le temps pour contempler le cadeau de Donald Ayler. Raymond Boni est celui qui connaît et apprécie les contributions que Donald Ayler a apportées à notre liberté collective, et qui a compris que la liberté est un travail en cours — work in progress — qui ne sera jamais terminé. Les sons de sa guitare font écho au cri d'amour incandescent de la trompette de Donald Ayler et offrent une résonance poétique à sa vie. Donald est parti, mais il n'est pas oublié. »